Homélie Annonciation du Seigneur Samedi 25 mars 2023

Luc 1, 26-3

Au sixième mois d’Élisabeth, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une jeune fille vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph ; et le nom de la jeune fille était Marie. L’ange entra chez elle et dit : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. » À cette parole, elle fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. L’ange lui dit alors : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. » Marie dit à l’ange : « Comment cela va-t-il se faire, puisque je ne connais pas d’homme ? » L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu. Or voici que, dans sa vieillesse, Élisabeth, ta parente, a conçu, elle aussi, un fils et en est à son sixième mois, alors qu’on l’appelait la femme stérile. Car rien n’est impossible à Dieu. » Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta.


Chers Frères et Sœurs,

N’est-il pas paradoxal de célébrer aujourd’hui la solennité de l’Annonciation, le oui sans condition que Marie répondit à l’ange du Seigneur, l’événement par lequel la joie est entrée dans le monde, tandis que tant d’inquiétudes de tous ordres touchent nos contemporains, et que tant de menaces semblent se répandre parmi nous ?
Regardons Marie, jeune fille vierge, fiancée à Joseph, habitant à Nazareth, un village reculé de Galilée, loin de Jérusalem et des centres politico-religieux, cité proche de contrées païennes, au carrefour des nations, déjà une périphérie existentielle, propice à tous les métissages, lieu de réputation douteuse, au point que certains demanderont : De Nazareth, peut-il sortir quelque chose de bon ? (Jn 1, 46). C’est pourtant là, dans ce lieu reculé et improbable, que le Seigneur envoie son messager à Marie.
Marie peine à y croire et s’en trouve bouleversée. Franchement, ce n’est pas ici que l’on attendait l’ange du Seigneur venant dire : Réjouis-toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi, il t’a choisie ! Le Seigneur a favorisé ce qui était petit et dans un lieu éloigné, et il continue à venir rejoindre aujourd’hui chacun des petits ou des pauvres, en qui il cherche à naître et à renaître, là où ils sont, dans les agglomérations urbaines, les immeubles, les bureaux, les hôpitaux, les prisons, les camps de réfugiés… Comme le Seigneur est allé chercher Marie pour transmettre la joie qu’il destine au monde, ainsi fait-il envers chacun de nous, disciples de sa joie, là où nous sommes malgré, ou peut-être à cause de nos faiblesses et des difficultés.

Mais demandera-t-on, comment vivrons-nous la joie de l’Évangile en des temps si troublés, dans nos villes menacées, dans un monde exposé aux conflits, aux crises politiques, aux désordres climatiques, aux épidémies ? Comment l’espérance est-elle possible, ici et maintenant, en des temps si menaçants ?
A nouveau, contemplons Marie. Elle aussi est bouleversée à la visite de l’Ange. Elle s’interroge et se demande : Comment cela va-t-il se faire puisque je ne connais pas d’homme ? (Lc 1, 34) Elle finira enfin par consentir, et prononcera un oui qui l’engagera tout entière, permettant au plan du Salut de s’accomplir.
Un oui qui donnera au monde une joie irrémissible. Marie dira : Que tout m’advienne selon ta parole, je suis la servante du Seigneur (Lc 1, 38).

Chers Frères et Sœurs, si dans nos vies les circonstances deviennent difficiles, si nous nous prenons à nous interroger, à nous demander ce que fait le Seigneur, pourquoi il semble si loin, comme Marie, souvenons-nous alors de tout ce qu’il a déjà réalisé de grand pour nous-mêmes, pour nos parents, nos grands-parents, tous ceux par qui nous avons, aujourd’hui encore, la grâce d’exister dans le plan de Dieu.
Rappelons-nous que par la grâce de Dieu, nous appartenons, nous aussi, à un peuple immense, à une famille appelée à aimer et qu’on appelle l’Église, famille multimillénaire, présente en toutes nations et tous peuples, et surtout parmi nous, ici, dans notre paroisse, dans notre communauté, peut-être aussi dans notre famille de sang. Un lien très fort nous unit, lien nourri d’amour.

Enfin, si comme Marie, nous croyons que rien n’est impossible à Dieu (Lc 1, 37) et que nous nous laissons aider et conseiller, alors nous disposons de bien plus que nos seules forces et nos ressources limitées pour affronter l’épreuve. Notre joie devient un rempart (cf. Ne 8, 10). Nous devenons les alliés du Seigneur, amis et disciples qu’il recherche sans se lasser, dans nos quartiers et sur nos routes, pour vaincre les guerres, trouver la paix et gagner la joie.

Beaucoup semblent demander : pourquoi Dieu est-il absent ? Du moins, pourquoi n’est-il pas plus présent ni plus visible, dans ce monde tourmenté ?
Disons-le : le Seigneur ne nous annonce rien, sinon cette indéfectible offre d’amour, toujours disponible, juste à la portée de nos mains. Mais un amour qui demeure impuissant sans notre concours, sans notre oui, sans notre fiat.
Alors avec Marie, redisons-le : Oui, que tout m’advienne selon ta Parole !

Amen
Père Marc D.